Les yeux de l’imaginaire
J’ai créé Les yeux de l’imaginaire pour faire découvrir le patrimoine et les trésors de la photographie aux personnes aveugles et malvoyantes. Sous la forme d’un cours individuel, progressif et adapté, nous entrons ensemble dans le monde de la photographie.
Je suis photographe. Au fil du temps, j’ai construit l’idée qu’une photographie est un petit monde en soi. Je dis souvent « Une photographie est un objet en plus ». En théorie, nous regardons mais il n’est pas si facile de voir. Quand bien même, pour un photographe, regarder est comme une seconde nature.
Régulièrement – c’est un exercice de travail – je ferme les yeux, j’essaie de sentir ce qu’il y a autour de moi et de stabiliser ma mémoire visuelle en reformant l’image de ce que j’ai vu.
Les sens se mélangent
En fermant les yeux, j’essaie de passer d’un sens à l’autre. Voir et ne pas voir, sentir, écouter, entendre et dire les sensations. Pour aller au-delà de la description, trouver des mots pour dire une photographie et ses émotions, ce n’est pourtant pas si simple.
Donc, découvrir l’univers d’une photographie, c’est d’abord la regarder. Pour la voir, il nous faut nous laisser prendre dans son espace et dans son silence. C’est toujours évoluer d’un état à un autre. Progresser d’une réalité d’un instant passé et photographié vers sa représentation sur papier, et réciproquement. C’est le parcours que font les yeux pour regarder. L’imaginaire du regard est propre à chacun. Sa progression est différente.
Comme le souligne le travail de Michael Baxandall sur le parcours des yeux à regarder un tableau. Par exemple, son livre Ombres et Lumières.
Des photographes aveugles ou pas !
Evgen Bavcar qui est photographe et non voyant dit : « Mes images sont fragiles; Je ne les ai jamais vues, mais je sais qu’elles existent et certaines m’ont beaucoup ému. » Il dit aussi «Je sais qu’il y a des choses qui m’échappent, mais c’est vrai aussi pour les photographes voyants. »
Sonia Soberats questionne ses modèles sur leur physique et dirige leurs gestes. Elle construit chaque détail par ses propres moyens avant qu’un assistant ne se charge de la capture de l’image.
Même si Vivian Maier était voyante, elle n’a pourtant vu la plupart de ses photographies qu’au moment de les cadrer. D’ailleurs je rappelle qu’au moment de déclencher, nous ne pouvons pas voir l’image, c’est un moment aveugle. N’ayant pas d’argent pour faire développer ses films et faire des tirages sur papier, toutes ses photographies sont restées des images latentes, en rouleaux, jusqu’à leurs découvertes. En d’autres termes, continuer à faire des photographies sans les voir était plus important que ne pas en faire parce qu’elle ne pouvait pas les voir. Ses images étaient là, quelque part. Étrange quand on sait l’attachement d’un photographe à voir ce qu’il a fait.
Un franchissement et un passage
Les yeux de l’imaginaire permet de traverser des propriétés, des terrains très diversifiés. D’une personne qui voit à une personne qui ne voit pas, comment faire ? Comment raconter ce qu’une photographie montre et ce qu’elle ne montre pas ?
Écouter les photographies c’est votre rendez-vous pour une rencontre étonnante et singulière.
Personnes aveugles et malvoyantes
Je rappelle qu’en France, près de 1,7 million de personnes sont atteintes d’un trouble de la vision. Un aveugle naît toutes les 15 heures.
Nous comptons 207 000 aveugles. Être malvoyant profond, c’est ne pas percevoir la lumière et avoir une vision limitée à la distinction de silhouettes. Nous comptons aussi 932 000 malvoyants moyens qui sont en incapacité visuelle sévère. À savoir, en vision de loin ils sont en incapacité de distinguer un visage à 4 mètres et en vision de près en incapacité de lire.
Pour parfaire votre connaissance, reportez vous au site Aveugles de France et d’autres sites encore qui sont liés dans les pages Liens amis.
Un site en accessibilité
La création du site Les yeux de l’imaginaire est dit en accessibilité. Cela doit répondre à des critères de lisibilité conformes aux codes prévus à cet effet. Il faut donc porter une attention particulière aux caractères typographiques, aux couleurs, aux mises en page, à la répartition des menus. Les photos d’illustration doivent avoir une description écrite spécifique pour les personnes aveugles et malvoyantes. Le site soit rester agréable à lire pour les personnes voyantes.
Alors, je me suis efforcée d’y répondre. Je me suis documentée et j’ai fait un stage Accessibilité numérique pour vérifier et compléter mes connaissances. Tout doit pouvoir fonctionner pour les personnes utilisant un système de ligne en braille ou de synthèse vocale ajouté à l’ordinateur. Cette synthèse vocale lit ce qui écrit à l’écran. D’autre part, il existe des systèmes d’agrandissement. Cela demande de forts contrastes sur le site.